Averroès

Averroès
1126-1198

Averroès était un juriste, philosophe, théologien, mais aussi un médecin musulman. Il naît en 1126 à Cordoue, en Andalousie dans une famille respectée de Cadis, juges et notaires musulmans.  Averroès acquiert une formation solide dispensée par des maîtres particuliers. Son père l’initie très jeune à la théologie et à la jurisprudence. Averroès élargit ses connaissances par l’apprentissage des sciences profanes : physique, médecine, et astronomie. À l’issue de sa formation, il est un homme passionné par la religion, la philosophie, la science et la nature.

Ses compétences l’amènent à partager sa vie entre l’Andalousie et le Maroc. En 1162, il rédige un « Livre de médecine universelle » intitulé Colliget qui lui vaut une notoriété immédiate. Traduit en hébreu et en latin, cet ouvrage servira de référence dans les facultés de médecine occidentales jusqu’au XVIIIème siècle. Médecin de princes influents, il devient à seulement 27 ans le réformateur de l’administration de la justice à Marrakech. Médecin émérite, Averroès n’en demeure pas moins un magistrat influent. En 1170, il est nommé Cadi à Séville et inscrit ses pas dans ceux des siens. Il rédige dans ce cadre des livres de droit dont le plus connu, la Bidâya, est encore étudiée de nos jours à Médine. Praticien et théoricien du droit, Averroès s’attachera à trouver des accommodations à la Loi religieuse susceptibles de faire jurisprudence. Deux ans plus tard, il est fait Grand Cadi à Cordoue, fonction qu’il occupera pendant dix ans.

Averroès est reconnu par les Latins non pour ses connaissances en médecine et en droit mais pour ses écrits philosophiques et en particulier ses commentaires sur la pensée d’Aristote. A la demande du Calife Yacoub Youssef, il est invité en 1166 à expliquer la philosophie d’Aristote. Aidé des principes de la pensée logique et de ses connaissances, Averroès cherchera à redécouvrir le sens premier de la pensée d’Aristote en se libérant des interprétations antérieures souvent approximatives. Il consacrera une grande partie de sa vie à étudier l’héritage d’Aristote et en particulier la question de l’origine des êtres. Ses recherches l’amèneront à séparer radicalement la raison de la foi.

Averroès se heurte à la difficulté de concilier philosophie et religion et doit subir les critiques vives des oulémas, docteurs de la loi musulmane. Dans un Maghreb confronté à la guerre sainte, la philosophie est bannie du Maroc en 1188. En 1195, Averroès est l’objet d’une campagne de calomnie menée par les oulémas. Le Sultan Al-Mansûr cède à la pression des religieux en sacrifiant ses intellectuels. Averroès est contraint à s’exiler en 1197 à Lucena, petite ville d’Andalousie. Son exil ne durera toutefois qu’un an et demi. Rappelé au Maroc, il reçoit le pardon du Sultan sans toutefois récupérer ses fonctions.

Il meurt en 1198 à Marrakech sans avoir eu le temps de revoir son Andalousie natale. Suspecté d’hérésie, son héritage ne sera pas célébré en terre d’Islam. Ses écrits seront toutefois sauvés par les traducteurs juifs et sa philosophie enseignée en Occident durant tout le Moyen-âge.  Dans la mémoire collective, Averroès reste un mathématicien, un médecin, un homme de loi et un des grands penseurs de l’Espagne musulmane du XIIème siècle. Ce grand commentateur de la pensée d’Aristote a, malgré les persécutions, développé une vision très moderne des rapports du philosophe avec la religion. Tolérant, Averroès était un intellectuel à la croisée des cultures. En séparant la raison de la foi, il peut être considéré à juste titre comme l’un des précurseurs de la pensée laïque actuelle et d’un courant qui émergera trois siècles plus tard, l’humanisme.


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(Texte de Margaux MIGNARD)