Mahmoud Darwich

Mahmoud Darwich
1941 - 2008

Mahmoud Darwich est considéré comme l’un des principaux et les plus talentueux poètes arabes de sa génération. Né le 13 mars 1941 à Al-Barwa en Galilée, il n’a que sept ans lorsqu’éclate la guerre israélo-arabe. Forcée à l’exil après la destruction de son village, sa famille se réfugie au Liban avant de revenir clandestinement dans l’État d’Israël nouvellement créé. Après des études dans des écoles arabes israéliennes, le jeune Darwich part s’installer dans l’importante communauté arabe d’Haïfa, au nord d’Israël. Il publie à seulement dix-neuf ans son premier recueil de poésie, Oiseaux sans ailes. A 20 ans, il milite secrètement au sein du Parti communiste judéo-arabe et devient rédacteur-adjoint d’Al-fajr, journal hostile à Israël. Son recueil Rameaux d’olivier (1964) trouve un écho considérable dans tout le monde arabe. Dès lors, Mahmoud Darwich devient malgré lui l’incarnation de la résistance palestinienne face à Israël.

Arrêté et emprisonné à plusieurs reprises entre 1961 et 1967, Mahmoud Darwich retranscrit dans ses poèmes ses rêves de nation, de soulèvement et d’identité. Assigné à résidence en 1970, il finit par choisir l’exil. Il part pour Moscou étudier l’économie politique puis s’installe au Caire en 1971. Deux ans plus tard, Mahmoud Darwich se rend à Beyrouth où il travaille comme rédacteur en chef au Centre de recherche palestinien de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Il rédigera dans ce cadre plusieurs discours pour Yasser Arafat.

L’invasion israélienne au Liban à l’été 1982 pousse Darwich à fuir Beyrouth pour Tunis. Il reprendra ensuite la route pour le Caire et Paris et deviendra en 1987 membre du Comité exécutif de l’OLP.  Conscient que les accords d’Oslo ne sont qu’un leurre et qu’ils n’apporteraient pas une paix juste pour les Palestiniens, Mahmoud Darwich démissionne de l’OLP en 1993. Deux ans plus tard, il se rend dans la bande de Gaza avant de s’installer durablement en Cisjordanie, à Ramallah, où il dirige la revue Al Karmel. En mai 1996, les autorités israéliennes autorisent le poète à entrer sur leur sol pour la première fois depuis son exil, pour les obsèques de l’écrivain arabo-israélien Emile Habibi.

Pendant les années d’exil, Mahmoud Darwich continue à défendre son peuple à travers sa plume lyrique. Ses poèmes écrits de l’étranger entrent en Palestine sur un nuage. Les plus célèbres,  Identité, Rita ou Je me languis du pain de ma mère marqueront des générations entières. Encensée dans le monde arabe, sa poésie parle de l’exil, de la guerre, de la prison mais aussi de l’amour et de la mort. Marquée par la douleur et la mélancolie dans ses débuts, l’écriture de Darwich devient plus épurée avec le temps pour laisser transparaître son engagement politique.

Mahmoud Darwich s’est éteint le 9 août 2008 à Houston, aux États-Unis, où il venait de subir une opération à cœur ouvert. Il avait 67 ans. L’Autorité palestinienne décrétera un deuil officiel de trois jours. Il aura publié une trentaine de recueils traduits en quarante langues. Reconnu dans le monde entier, Mahmoud Darwich avait reçu de nombreux prix, comme celui du Prince Claus en 2004, récompensant une voix, celle des Palestiniens opprimés.

Poète pacifiste très impliqué dans la lutte de son peuple, Mahmoud Darwich a cependant toujours refusé d’être réduit au simple rôle de porte-parole de la cause palestinienne. Il voulait être lu non comme une cause mais comme un poète ; non comme une victime contrainte à l’exil, mais comme un homme apatride, avide de liberté et de justice. C’est en cela que sa poésie a encore aujourd’hui une résonance remarquable.

Les souffrances de son peuple étaient toutefois pour lui une blessure profonde : »On ne peut vivre avec la blessure de la disparition de la patrie, avait-t-il déclaré un jour au Monde, que si une cohabitation équilibrée s’instaure entre les « deux réalités », juive israélienne et arabe palestinienne, dont aucune ne peut éradiquer l’autre ». Il aura plaidé toute sa vie pour la création d’un État palestinien sans pour autant contester l’existence d’Israël. Il est en ce sens l’incarnation des valeurs de fraternité, d’équité et de coexistence paisible entre les deux peuples.


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(Texte de Margaux MIGNARD)