Élisabeth de Miribel

Élisabeth de Miribel
1915 - 2005

Arrière-petite-fille du maréchal de Mac-Mahon, Élisabeth de Miribel naît le 19 août 1915 dans une famille de militaires et de grande aristocratie. Après avoir passé son baccalauréat, elle entreprend des études de psychologie à la Faculté de lettres de Paris puis à l’Université de Genève. Après avoir fréquenté les mouvements sociaux d’inspiration chrétienne, elle part à Londres en septembre 1939 rejoindre la mission française de guerre économique dirigée par l’écrivain et diplomate Paul Morand.

Révoltée par la demande d’armistice du Maréchal Pétain, elle refuse de rentrer en France et décide, comme beaucoup de Français de Londres, de rester en Angleterre. Son ami d’enfance Geoffroy de Courcel, alors aide de camp du Général de Gaulle, la contacte le 13 juin pour dactylographier ce qui deviendra le célèbre appel et l’acte de naissance de la France libre. Elle vient de rencontrer l’Histoire à seulement 24 ans et aura plus tard ces mots : Je m’applique laborieusement à lire un texte finement écrit et surchargé de ratures. Ces mots vont constituer une page d’histoire. Je ne le sais pas encore. Pourtant j’ai l’obscur pressentiment de participer à un événement exceptionnel. (La liberté souffre violence,1981). Elle devient dès lors une des plus proches collaboratrices du Général.

En juillet 1940, de Gaulle envoie la jeune femme au Canada préparer l’installation d’un Comité de la France libre. Pensant susciter l’enthousiasme, la missionnaire du Général découvre une élite française conservatrice, bienveillante envers Vichy et un gouvernement canadien fébrile. La jeune femme de 25 ans rencontre toutefois des Français libres de New York, Sieyès, Maritain, et Focillon qui lui redonnent espoir. Elle persuade de Gaulle d’envoyer une mission pour accélérer le ralliement des Français de Montréal. Au printemps 1941, elle met en place la mission du capitaine de vaisseau, Thierry d’Argenlieu, point de démarrage au mouvement français libre au Québec et à la nomination d’un délégué auprès du gouvernement fédéral. Forte de ce succès diplomatique, Élisabeth de Miribel devient responsable du service d’information français libre installé à Ottawa. Elle organise, dans le cadre de cette fonction, de nombreuses conférences et émissions de radio, rédige de multiples brochures et bulletins d’information et sillonne le pays. Sa force de conviction parvient à fédérer l’opinion et le gouvernement canadien derrière le chef de la France libre.

En 1943, de Gaulle demande à Élisabeth de Miribel de le rejoindre à Alger. Sur place, elle tente de publier un journal, avec l’aide du journaliste et résistant Géraud Jouve, mais échoue. Se jugeant plus utile auprès des combattants, la jeune femme décide de partir sur le front en Italie en avril 1944, comme correspondante de guerre. Elle part ensuite pour la Normandie, auprès de la 2e division blindée où elle assiste à la rencontre inoubliable entre la France et ses soldats. Elle rejoint la division du Général Leclerc le 13 août pour couvrir la marche des blindés sur Paris et la libération de la capitale. À l’automne 1944, elle est intégrée au cabinet du général de Gaulle en tant qu’attachée de presse.

Après la guerre, Élisabeth de Miribel débute une carrière de diplomate pour l’abandonner dès 1949 au profit de l’Ordre du Carmel. Elle quittera néanmoins la vie religieuse cinq ans plus tard pour revenir aux Affaires étrangères, au cabinet de Pierre Mendès France. Elle sera affectée successivement en Suisse (1955), au Maroc (1957-1961), au Chili (1966-1970), en Autriche (1970-1977), et terminera sa carrière à Florence (1977-1980). Elle occupera durant ces années les postes d’attachée de presse, secrétaire d’ambassade, attachée au service des relations culturelles puis de l’administration centrale pour finir, consécration ultime, Consul général.

Élisabeth de Miribel s’est éteinte le 29 mars 2005 à Paris à l’âge de 89 ans. Elle était  l’auteur de plusieurs biographies, en particulier sur Edith Stein (1961) et Giorgio La Pira (1992) et d’une autobiographie, La liberté souffre violence (1981). Elle était Officier de la Légion d’honneur et de l’Ordre national du Mérite, médaillée de la Résistance, et Chevalier des Arts et des Lettres.

Cette femme admirable avait placé son action sous le signe du courage, du dévouement, de la foi et de la liberté. De l’agitation londonienne aux couloirs feutrés de la diplomatie, en passant par le calme du Carmel, le parcours de cette femme au destin hors norme est lumineux, passionné et remarquable. « On résiste plus mal au succès qu’à l’épreuve; à la société de consommation qu’à des sociétés plus dures». Les paroles de cette femme libre, témoin engagé et privilégié du XXème siècle, raisonnent encore aujourd’hui avec une incroyable justesse.


Lien vidéo :

  • aucune vidéo ne lui est consacrée de manière exclusive, elle témoigne dans cette vidéo avec d’autres : www.ina.fr

(Texte de Margaux MIGNARD)